Ci-après, copie du texte de Mr Christian Dupuy, archéologue, spécialiste de l’étude de gravures rupestres sur des rochers à l’air libre en zone saharienne.
Il s’agit de sa réponse à ma demande d’interprétation des photos présentées dans ce site.
De : Christian <dupuy……………………..fr>
Objet : Rép : Gravures Rupestres Libye
Date : 6 février 2011 15:28:11 HNEC
À : Pierre HASCOET <pierrehascoet@neuf.fr>
Répondre à : Christian <dupuy………………….fr>
Cher Monsieur Hascoët,
Ces expressions sont fortement empreintes de schématisme : absence de perspective au niveau des pattes des animaux rendues sans soucis de précision anatomique, corps basculés par rapport à d’autres, absence de scènes composées. Malgré leur stylisation, les figures sont identifiables. Le premier rocher est orné d’une autruche, d’un taurin, peut-être un taureau (par taurin, j’entends un Bos taurus, c’est-à-dire un bovidé domestique à dos droit) muni de trois pendeloques sous jugulaires dont la silhouette recoupe orthogonalement le corps d’un autre taurin aux cornes recourbées vers l’avant (il est impossible de dire au vu de la photo quel animal est dessus). L’ornementation comprend aussi une antilope à longues cornes orientées vers l’arrière (peut être une antilope oryx). A noter également la présence de deux plages piquetées. La deuxième paroi supporte deux taurins en course entre lesquels s’intercale un quadrupère au trait piqueté plus superficiel difficile à identifier sur la photo, en partie dans l’ombre un mammifère à long cou (peut-être une girafe) suivi par ce qui semble être un autre taurin.
Par leur style et les thèmes qu’elles développent, ces gravures se rattachent aux expressions du Néolithique final dont certaines intègrent par endroit des véhicules à roue. Leur réalisation est antérieure ou en partie contemporaine du début de l’époque des chars que l’on situe dans le IIe millénaire av. J.-C. On peut aussi affirmer qu’elles sont postérieures aux expressions naturalistes des premiers temps de l’art rupestre saharien datables des VIe-IVe millénaires av. J.-C. puisqu’en de nombreux endroits de telles gravures recouvrent selon un ordre immuable ces expressions naturalistes. Des pasteurs qui privilégiaient et valorisaient l’élevage des taurins en sont les auteurs. Ces pasteurs étaient probablement très mobiles, sinon nomades, à en juger par la vaste extension géographique de cet art schématique qui s’exprime à une époque -les IIIe-IIe millénaires av. J.-C.- où l’aridité au Sahara central allait croissante.
J’espère que ces quelques renseignements vous seront utiles. N’hésitez pas à me contacter si vous avez besoin d’autres précisions.
Bien cordialement.